Le début d’une nouvelle ère

Dans cette Ligue 1 où la majorité des clubs connaissent des déboires financiers résultant d’une gestion scabreuse lors de la dernière décennie, le Stade de Reims fait office d’anomalie. Le club champenois ne dispose pas d’un propriétaire milliardaire pouvant injecter plusieurs dizaines ou centaines de millions d’euros, il ne dispose pas non plus d’un propriétaire État pouvant proposer des contrats de sponsoring surréaliste, et il n’est pas non plus détenu par un consortium étranger intéressé avant tout par les profits et le business qui résulte du football. Le Stade de Reims est détenu par un homme d’affaires du cru, qui aime le club, qui a été supporter du club et qui a participé à la reconstruction de celui-ci lorsqu’il est retombé dans le monde amateur : Jean-Pierre Caillot. Et « JPC », depuis plusieurs saisons maintenant, a le projet de faire évoluer le club afin d’en faire un club de l’élite du football français. Nous allons voir en quelques points les différents domaines d’évolutions du club des dernières saisons.

 

1. L’évolution des infrastructures

Si le stade Auguste Delaune n’appartient pas au club mais à la ville de Reims, des rénovations ont été entamées au début des années 2000, lorsque le club retrouvait le monde professionnel, et se sont terminées en 2008. Plus récemment, des modernisations ont été effectuées via la pose d’écrans géants, d’une pelouse hybride ou encore de projecteurs LED.

Il est en effet important pour un club ambitieux comme Reims de disposer d’un stade pouvant accueillir des évènements importants du monde du football comme les équipes de France masculines et féminines, ou des compétitions internationales telles que la Coupe du Monde féminine. Les investissements de la ville de Reims dans son stade sont évidemment le fruit du renouveau du club.

Mais le plus gros projet du club est le centre de vie Raymond Kopa. Ce n’est pas un simple centre d’entraînement, il s’agit d’un complexe accueillant les locaux administratifs, ceux du centre de formation avec des salles d’études, des dortoirs, un amphithéâtre, ceux de l’équipe première avec des salles de musculation, des salles médicales, des piscines mais aussi une quinzaine de terrains d’entraînements et de matchs pour les équipes de jeunes, réserves et féminines. Et ce centre de vie ne cesse d’être en constante amélioration avec dernièrement la création d’un bâtiment dédié à la section féminine. Un projet qui aura coûté près de 8 millions d’euros à sa construction et qui dépasse les 10 millions d’euros suite aux agrandissements qui s’en sont suivis. Le club dispose désormais d’un centre de haut niveau, parmi les plus à la pointe en France, nécessaire au développement structurel du club.


2. Le développement de la structure sportive

Le football français est en retard sur de nombreux points, et notamment dans sa direction sportive. Le travail de scouting est encore trop marginal et amateur, l’encadrement sportif au sein du club est bien trop sous-estimé. Et depuis quelques saisons, Reims a pris un virage à 180 degrés dans sa manière de fonctionner pour faire confiance à des gens compétents, bien plus moderne et en adéquation avec le football moderne.

Le réseau de recrutement se résumait, autrefois, à un ou deux recruteurs, des vidéos de joueurs, de l’influence de certains agents mais surtout des choix du président qui, s’il est sans doute un connaisseur averti du football, n’a pas la science de l’analyse des recruteurs professionnels. Et depuis quelques années maintenant, il n’est plus inclu dans le processus de recrutement. C’est Mathieu Lacour, le directeur sportif, qui en a la charge. Pol-Edouard Caillot s’occupe quant à lui de la coordination de ses équipes de recruteurs, présentes un peu partout en Europe.

Le staff technique de l’équipe première qui était autrefois composé d’un entraîneur et de son adjoint, d’un entraîneur des gardiens, d’un préparateur physique, d’un kiné et d’un médecin s’est aujourd’hui considérablement élargi comptant dans ses rangs près de 16 personnes, toutes spécialisées dans un domaine bien particulier tel qu’un responsable de la prévention musculaire, un responsable vidéo, un data analyste, un data scientist ou même un podologue.

Un staff est également entièrement dédié au suivi des jeunes joueurs de la Pro 2 dans l’optique de leur mettre à disposition les outils pour se préparer au monde professionnel.

Le club ne laisse ainsi rien au hasard et met tout en œuvre pour que les joueurs soient dans les meilleures conditions possibles pour progresser et performer les jours de matchs.


3. Un trading raisonné

C’est l’une des notions clés de l’évolution sportive rapide du club champenois ces dernières saisons. Cet été, le Stade de Reims a beaucoup fait parler de lui, en recrutant pour près de 50 millions d’euros alors que le budget du club est estimé à 90 millions d’euros cette saison.

Comment un club comme Reims peut-il dépenser plus de la moitié de son budget dans le recrutement de joueurs ? En comparaison, un club comme l’Olympique Lyonnais a eu toutes les peines du monde à investir 20 millions d’euros cet été avec pourtant un budget avoisinant les 230 millions d’euros, soit le troisième plus élevé de Ligue 1, tout en sachant que le club rhodanien a vendu pour plus de 100 millions d’euros.

La réponse est assez simple : la politique de trading menée depuis plusieurs saisons pour la direction sportive porte, années après années, ses fruits permettant au club de faire un mercato à chaque fois plus ambitieux. Lors de l’été 2018 suivant la montée en Ligue 1, le club a voulu renforcer considérablement son effectif et a massivement recruté en investissant près de 15 millions d’euros, permis notamment cet été-là par la vente de Siebatcheu à Rennes pour 9 millions d’euros. Et durant les saisons qui suivent, les mercatos vont tourner autour de ce montant (entre 10 et 20 millions d’euros).

Mais cinq ans plus tard, sous l’impulsion de Will Still, le club va dépenser le triple de cette somme dans l’optique de faire peau neuve et de régénérer l’effectif en investissant sur quelques joueurs devant être des titulaires et permettre à Reims d’intégrer durablement le Top 6-8, réel objectif de la direction du club.

Voici un récapitulatif des arrivées et des départs de ce mercato estival, du côté des achats :
– Daramy : 12M€ (hors bonus)
– Nakamura : 10M€ (hors bonus)
– Okumu : 9M€ (hors bonus)
– Teuma : 3,6M€ (hors bonus)
– Salama : 3,5M€ (hors bonus)
– Diakite : 2,5M€ (hors bonus)
– Bojang : 2M€ (somme estimée)
– Khadra : 1,9M€
– Total : 44,5M€

Et du côté des ventes :
– Ekitike : 33,5M€ (bonus inclus)
– Cajuste : 11M€ (hors bonus)
– Lopy : 6,5M€ (hors bonus)
– Flips : 4,2M€
– Gravillons : 2,1M€
– Kebbal : 2M€
– Zeneli : 1,9M€
– Hornby : 1,8M€
– Van Bergen : 1M€
– Locko : 500k€
– Sierhuis : 500k€
– Mbow : : 500k€
– Cervantes : 500k€
– Guitane : 250k€
– Maresic : 250k€
– Pourcentage plus-value Disasi : 3M€
– Pourcentage plus-value EB Touré : 5M€
– Total : 74,5M€

Soit une marge de 30M€ sur ce mercato. Même en enlevant la vente exceptionnelle due à l’éclosion aussi surprenante, qu’inattendue d’Ekitike, le club pourrait avoir une balance proche de l’équilibre.

Cette « marge » estimée n’est que fictive et servira, en réalité, à de bien nombreuses dépenses telles que :
– Régler les commissions d’agents et intermédiaires intervenues directement ou indirectement dans les transferts (achats/ventes)
– Amélioration et développement du centre de vie
– Investissement lors du mercato d’hiver sur d’éventuelles opportunités de marchés

Ces bénéfices sur le marché des transferts sont les fruits de ce trading raisonné qui se basent sur une notion assez simple qui est de diversifier ses stratégies d’investissements dans le recrutement de jeunes joueurs. Ces dernières années, le club a travaillé sur plusieurs secteurs de recrutements avec des réussites et des échecs qui sont les suivants :
– Mise en avant des purs produits de la formation rémoise (Ekitike, Cervantes, Atangana, Byar)
– Recrutement de jeunes talents français pour la formation (Mbuku, Diakhon, Koudou)
– Développement de la post-formation (Disasi, Flips, Locko, Kebbal, Brahimi, Guitane)
– Attirés des jeunes talents prisés en Europe (Daramy, Cajuste, Nakamura, Zeneli, Diakité)
– Recrutement au sein d’académies africaines (El Bilal Touré, Lopy, Mbow, Doucouré, Diarra, Doumbia, Sekongo, Bojang)
– Recrutement de jeunes talents internationaux (Lukic, Henry, De La Cruz, Mo. Touré)

Si tous n’ont pas ou ne vont pas réussir à éclore au club, ceux qui vont réussir vont permettre d’amener une plus-value sportive à l’équipe mais aussi un retour sur investissement financier des plus intéressants, permettant au club de continuer à se développer et à grandir.

 

Pour conclure, s’il y a sans doute d’autres aspects à évoquer pour expliquer l’évolution du club ces dernières saisons, voici trois points qui me semblent déterminant et qui démontrent comment un club bien géré et patient, faisant les choses dans l’ordre, sans griller les étapes, peut (re)devenir un club qui compte dans le paysage du football français. C’est en tout cas ce que l’on espère en tant que supporter. Il n’y a certes eu que peu d’épopée et de parcours incroyables en coupe ou en championnat, mais je suis persuadé que le meilleur est à venir pour le Stade de Reims et peut-être même dès cette saison. Ce ne serait que juste récompense pour tous ceux qui ont permis le renouveau de ce club mythique qu’est le Stade de Reims.

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